avril 2020 - Page 16 sur 20 - Journal du niger

Les Maliens élisent leur parlement malgré la guerre et le virus

Guerre, coronavirus, principal opposant enlevé… Le contexte est aussi sombre avant le second tour des législatives au Mali dimanche qu’il l’était avant le premier, mais le gouvernement a choisi de maintenir le scrutin.

« En démocratie, rien ne vaut la pleine légalité constitutionnelle ainsi que le jeu normal des institutions », a déclaré le président Ibrahim Boubacar Keïta il y a quelques jours, s’adressant à la nation un masque protecteur sur le visage.

Il y va de la nécessité d’apporter des réponses autres que strictement militaires à la profonde crise sécuritaire, politique ou économique que traverse le pays depuis des années, a justifié le chef d’Etat.

Malgré l’adversité, la majorité de la classe politique soutient le maintien de ce scrutin reporté à plusieurs reprises.

L’enjeu est de taille: renouveler un parlement élu en 2013 et dont le mandat devait s’achever en 2018, et faire enfin progresser l’application de l’accord de paix d’Alger.

Celui-ci, signé en 2015 entre les groupes armés indépendantistes et Bamako, prévoit plus de décentralisation via une réforme constitutionnelle qui doit passer par l’Assemblée. Or la légimité du parlement sortant est contestée.

Mais comment motiver des Maliens qui remettent en cause la capacité de leurs dirigeants à sortir le pays de la guerre et de la pauvreté ?

– Menaces jihadistes –

D’abord concentrée dans le nord du pays en proie à des rebellions indépendantistes, la crise a dégénéré avec l’arrivée sur l’échiquier sahélien de groupes jihadistes à partir de 2012.

La violence frappe quotidiennement le centre et le nord du Mali et les voisins burkinabé et nigérien. Les attaques contre les soldats et les civils alternent avec les explosions de mines artisanales, les morts se comptent par milliers et les déplacés par centaines de milliers. Vingt-cinq militaires, selon le gouvernement, ont été tués entre les deux tours dans une opération revendiquée par un groupe affilié à al-Qaïda.

« Dans le centre et dans le nord, est-ce que les populations pourront voter librement ? Dans le centre, les groupes terroristes sont en train de menacer les populations » pour les dissuader de voter, affirme Ibrahima Sangho, chef de mission de la Synergie, plateforme d’organisations qui déploient des observateurs lors d’élections.

Le premier tour du 29 mars a été marqué par des enlèvements de présidents de bureau et le vol et la destruction d’urnes. Dans les zones rurales de Tombouctou, les jihadistes ont conduit de nombreux raids d’intimidation à moto. « Ne votez pas ou vous aurez affaire à nous », disaient-ils en substance aux habitants, selon un rapport interne de l’ONU consulté par l’AFP.

Un millier de bureaux environ, sur plus de 22.000, n’ont pas ouvert, a admis le ministre de l’Administration territoriale Boubacar Alpha Bah, selon des propos rapportés par la télévision publique.

Dans certaines régions du nord, le large taux de participation (plus de 85% à Kidal pour une moyenne nationale de 35,6%, avec des députés élus avec 91% ou 97% des suffrages) laisse envisager « une possibilité de fraude », dit un diplomate sahélien.

Dans la capitale, la participation a été de 12,9%. Ces faibles taux de participation sont dans la norme malienne, rappelle M. Sangho, l’observateur.

– Défi sanitaire –

Sur les 147 sièges de députés, 22 ont été pourvus au premier tour.

Parmi eux: Soumaïla Cissé, le chef de file de l’opposition kidnappé le 25 mars alors qu’il était en campagne. A défaut de preuve formelle, tous les soupçons pèsent sur le groupe jihadiste d’Amadou Koufa. Des négociations secrètes sont menées pour sa libération, selon son parti.

« Soumaïla Cissé est un gros poisson qui pourra être échangé contre d’autres gros poissons emprisonnés », pense Bréma Ely Dicko, sociologue à l’Université de Bamako.

Ce rapt sans précédent n’avait pas dissuadé les autorités de s’en tenir au calendrier électoral, pas plus que l’officialisation, fortuitement simultanée, des premiers cas de contamination par le nouveau coronavirus. La campagne, déjà discrète, a dès lors disparu des débats, en dehors des affiches qui résistent à Bamako.

Le Mali a officiellement déclaré 171 patients et 13 décès. Ici comme ailleurs, l’inquiétude est grande quant à la capacité de faire face à une prolifération. Un couvre-feu nocturne a été institué, les écoles ont été fermées, des restrictions imposées aux activités.

Mais dans la capitale d’un des pays les plus pauvres de la planète dont une grande part de la population vit au jour le jour, les marchés, les mosquées, les transports en commun n’ont pas désempli.

« Ce n’est pas partout que les mesures contre le Covid-19 ont été appliquées » au premier tour, rapporte M. Sangho.

Le président malien a pris l’engagement que « toutes les mesures sanitaires et sécuritaires requises (seront) rigoureusement appliquées » dimanche.

Au Chili, le coronavirus met entre parenthèses la vague des manifestations

Il y a six mois, une vague de manifestations a commencé à agiter les rues du Chili, réclamant de profonds changements sociaux et l’adoption d’une nouvelle Constitution, mais la pandémie de Covid-19 a mis cette rage entre parenthèses.

Si le pays n’avait pas été rattrapé par la crise sanitaire mondiale, les Chiliens s’apprêteraient à aller aux urnes pour décider si oui ou non la Constitution héritée de la dictature d’Augusto Pinochet (1973-1990) devait être modifiée.

Destiné à apaiser la crise sociale commencée le 18 octobre, ce référendum, initialement prévu le 26 avril, a été reporté au 25 octobre.

La crise sociale, déclenchée par une hausse du prix du ticket de métro dans la capitale, s’est nourrie de la colère de la population face aux profondes inégalités socio-économiques et à la déconnexion de la classe politique vis-à-vis des problèmes quotidiens de la majorité des 18 millions de Chiliens.

Après six mois d’un mouvement de contestation sans précédent qui a fait 31 morts, le climat tendu de contestation qui secouait le pays a laissé la place à une ambiance calme, mélange de peur de la maladie et d’obéissance aux consignes de autorités, vidant les rues de Santiago, Valparaiso ou Concepcion.

A présent, le Chili compte ses morts du Covid-19, déjà plus d’une centaine, parmi les quelque 8.000 cas officiellement recensés.

Mais cette union communautaire contre le virus n’est qu’une pause et « bien sûr, les problèmes qui ne sont plus exprimés publiquement aujourd’hui, sont toujours là », déclare à l’AFP Patricio Zapata, avocat constitutionnaliste et membre du parti d’opposition Démocratie chrétienne.

« Nous nous trouvons dans une parenthèse et il existe une possibilité qu’après cette parenthèse, les choses reviennent à une situation en apparence similaire » à celle d’avant l’explosion sociale, prévient Juan Pablo Luna, professeur de sciences politiques de l’université catholique du Chili.

– « Tous sains en octobre » –

Mais cela « n’arrivera que si les conséquences de la crise sont telles que les gens préfèreront remettre à plus tard leurs revendications pour faire face à des besoins économiques de base » plus urgents, ajoute-t-il.

Les conséquences de la pandémie sur l’économie ont conduit le Fonds monétaire international (FMI) à prévenir que certains pays, comme le Chili, l’Equateur ou la France « continuent de courir le risque de nouvelles manifestations, particulièrement si les mesures de soutien sont jugées insuffisantes pour atténuer la crise du Covid-19 et ses retombées économiques, ou si elles sont jugées injustes en favorisant les riches » ou les multinationales.

Cette pandémie pourrait mettre en lumière le caractère inégalitaire de la société chilienne, un des principaux griefs des manifestants qui réclamaient davantage de présence de l’Etat dans les domaines de la santé, de l’éducation et des retraites, aux mains du secteur privé depuis le régime militaire de Pinochet.

« Selon moi, la gestion de la crise sanitaire peut probablement finir par mettre de nouveau à nu des problèmes structurels, comme les inégalités, et, dans ce cas, il me semble assez probable que le coronavirus finisse (…) par percuter le gouvernement en entraînant une seconde vague de protestations », juge Juan Pablo Luna.

Outre un scénario de ce type, l’avocat Patricio Zapata voit, lui, une autre possibilité: le fait d’avoir vécu une pandémie pourrait donner « plus d’élan aux forces du dialogue et de la coopération, ouvrant la voie à de grands accords ».

« Je souhaite tourner la page de ce chapitre pour nous unir à nouveau en faveur d’un changement politique, de Constitution. Tous sains en octobre ! », lance de son côté Maria José Gutiérrez, militante âgée de 30 ans, qui a lancé la campagne « Moi j’approuve », en référence à un nouveau texte fondateur.

Au Bangladesh, l' »apocalypse » de l’industrie du textile

Du jour au lendemain, Parvin, qui travaillait d’arrache-pied pour fabriquer des vêtements pour les grandes marques occidentales, s’est retrouvée parmi les centaines de milliers d’ouvriers du textile du Bangladesh privés d’emploi par la pandémie de coronavirus.

Forcées de fermer leurs boutiques à travers le monde pour respecter les mesures de confinement, les grandes marques de prêt-à-porter ont annulé pour des milliards de dollars de commandes passées au Bangladesh, l’un des centres mondiaux de production de vêtements.

Avec la fermeture en cascade d’usines, de nombreux ouvriers bangladais se retrouvent sur le carreau et leurs patrons craignent la faillite.

« La situation est apocalyptique », explique Asif Ibrahim, un propriétaire d’usine et directeur de l’Association des fabricants et exportateurs de vêtements du Bangladesh (BGMEA).

L’industrie du textile est vitale pour l’économie de ce pays d’Asie du Sud et constitue l’un des principaux moteurs de son boom économique ces deux dernières décennies. Les vêtements représentent 80% des exportations nationales et fournissent des emplois à plus de quatre millions de personnes, principalement des femmes de villages pauvres des zones rurales.

Couturière âgée de 28 ans, Parvin a attendu avec des milliers de collègues dans une longue file, respectant un mètre d’écart entre chaque personne, pour collecter son salaire de mars à l’usine Al Muslim, l’une des plus grandes du pays et qui fournit certaines des marques les plus prestigieuses de prêt-à-porter.

Puis la manufacture a fermé ses portes, jusqu’à une date indéterminée.

« Nous ne savons pas quand cela rouvrira », s’inquiète Parvin, qui n’a aucune autre source de revenus et décrit sa situation financière comme une « catastrophe »: « beaucoup d’usines ont déjà fermé. Mon mari est sans emploi ».

Depuis que la pandémie de Covid-19 a forcé les pays occidentaux à se confiner, les grandes marques de prêt-à-porter ont annulé ou repoussé pour au moins 3,1 milliards de dollars de commandes auprès des fabricants bangladais, selon la BGMEA.

Ces derniers temps, des milliers d’ouvriers – dont certains gagnent à peine 100 dollars par mois – ont manifesté en divers endroits de ce pays qui compte 160 millions d’habitants pour exiger le paiement de salaires qui leur sont dus.

« Beaucoup d’entre nous n’ont pas de nourriture à la maison actuellement. Nous ne pouvons même pas quémander dans la rue car les plus pauvres que nous se moqueraient de nous, vu que nous avons des emplois », explique Didarul Islam, qui travaille sur des machines à coudre.

« Que devons-nous faire ? Mourir de faim ? », ajoute cet ouvrier de 38 ans, père de deux enfants.

– Machines à l’arrêt –

La BGMEA et ses équivalents chinois, vietnamien, pakistanais, cambodgien et birman ont plaidé auprès des marques de prêt-à-porter pour qu’elles n’annulent pas leurs commandes.

« Il est temps pour les entreprises mondiales de maintenir et d’honorer leur engagement envers les droits du travail, la responsabilité sociale et des chaînes d’approvisionnement durables », ont déclaré ces organisations dans un communiqué conjoint.

Certaines grandes sociétés, dont H&M et Inditex – la maison-mère de la chaîne Zara -, ont promis en réponse de ne pas annuler les commandes déjà passées. D’autres ont requis des réductions, selon la BGMEA.

Mais aucune promesse n’a été faite pour l’avenir.

La situation est déjà terrible à Ashulia, centre industriel en périphérie de la capitale Dacca. Près de 600 usines sont implantées dans cette ville où les ouvriers vivent dans des bidonvilles de béton à proximité de leur lieu de travail.

Propriétaire d’une usine employant 250 personnes, Rubel Ahmed dit avoir d’ores et déjà perdu 50% de son activité.

Enchaînant les cigarettes devant les machines à l’arrêt de son usine, il qualifie cette pandémie de « cent fois pire » que le drame du Rana Plaza en 2013. L’effondrement d’un immeuble abritant un atelier de confection avait alors fait 1.130 morts et mis en lumière les conditions de travail parfois déplorables des ouvriers du textile du pays.

« Ceux qui ont des petites usines comme moi vont être pulvérisés », déclare-t-il.

Les groupes de défense des travailleurs du textile appellent les acteurs du secteur à faire preuve de responsabilité sociale.

« Lorsque cette crise sera terminée, les gens se souviendront quelles marques ont été répondu présent pour protéger leurs travailleurs et employés, et lesquelles étaient aux abonnés absents », met en garde Dominique Muller de Labour Behind the Label, une ONG britannique défendant les droits des travailleurs du textile.

Il y a 60 ans, Brasilia devint la capitale du Brésil

Le 21 avril 1960, le Brésil inaugure en grande pompe sa nouvelle capitale, Brasilia, cité futuriste créée ex nihilo, abritant de multiples chefs-d’oeuvre architecturaux.

Voici le récit de sa fondation, à partir des dépêches de l’AFP de l’époque.

Ce projet pharaonique a émergé en moins de quatre ans, sur la savane rouge des hauts plateaux semi-désertiques dans le centre-ouest du pays, à un millier de kilomètres de Rio de Janeiro (capitale depuis 1763), explique l’AFP, avant le début de plusieurs jours de festivités. Un lac artificiel, Paranoa, de plus de 40 km carrés, a même été aménagé.

Aux commandes de l’oeuvre – classée en 1987 au patrimoine de l’humanité – l’urbaniste Lucio Costa, le paysagiste Roberto Burle Marx et l’architecte Oscar Niemeyer, récompensé en 1988 par le prix Pritzker, équivalent du Nobel pour l’architecture.

– Vaste circonférence –

L’inauguration de la « capitale de l’espoir », suivant la formule popularisée par le ministre français de la Culture André Malraux, coïncide avec l’anniversaire de la mort du premier martyr de l’indépendance du Brésil, surnommé « Tiradentes » (arracheur de dents), qui appelait à établir la capitale au centre du pays.

A l’approche de l’événement, 24 heures sur 24, « cent mille ouvriers ingénieurs et techniciens mettent la dernière main au plus grand chantier du monde ».

« Pour abriter les bâtisseurs de Brasilia, une ville de fortune est née » au « milieu de la savane », avec « cent cinquante mille habitants, soixante hôtels, quarante bars et sept banques », appelée à être rasée une fois Brasilia achevée.

Le projet a été impulsé par le président brésilien Juscelino Kubitschek, pour qui « c’est une révolution géopolitique. Après avoir campé pendant presque deux cents ans au bord de l’eau, le Brésil va prendre possession de son territoire ».

Brasilia « a la forme d’une circonférence – tellement vaste que du sommet du gratte-ciel de 28 étages où seront logés les services administratifs relevant du Parlement, les limites n’en seront pas visibles », décrit l’AFP.

« A l’intérieur de cette circonférence », dont deux diamètres dessinent le signe de la croix, « les avenues (…) décrivent des cercles concentriques » ou « sont tracées suivant les rayons du cercle, mais ne débouchent jamais les unes sur les autres, des ponts et des tunnels ayant été aménagés à tous les croisements ».

– Chefs-d’oeuvre d’architecture –

Le Parlement aux deux demi-sphères, le palais présidentiel du Planalto et la Cour suprême fédérale sont situés sur la Place des Trois Pouvoirs, « centre de la circonférence » et « coeur de la cité ».

Parmi les « plus beaux monuments », une cathédrale futuriste, avec une énorme gerbe liant les tiges de béton symbolisant l’amitié entre le Brésil et le Portugal, ou le palais d’Itamaraty (ministère des Affaires étrangères).

Dans un premier temps, le transfert du pouvoir est surtout symbolique: « l’aménagement intérieur de nombreux édifices publics n’est pas achevé, les bureaux ne sont pas complètement installés, et surtout, le fonctionnement des ascenseurs est souvent précaire », explique l’AFP le 20 avril.

Le réseau téléphonique intérieur n’est pas au point. Des difficultés de dernière minute surgissent dans les liaisons radio avec les autres villes.

Difficile également de se déplacer dans une agglomération pratiquement dépourvue de transports publics, avec de longues distances.

L’heure est néanmoins à la fête. Le 20 avril, « les Brésiliens qui, depuis 24 heures affluent dans la nouvelle capitale laissent libre cours à leur enthousiasme devant des chefs-d’oeuvre de l’architecture ».

Pour bénir la cité, le cardinal Manuel Cerejeira, légat pontifical, apporte une croix au pied de laquelle fut dite en 1500 la première messe au Brésil.

Le président reçoit les clés de la ville devant « une foule d’environ 3.000 personnes », composée d’ouvriers en blue jean, paysans de hauts plateaux au visage brûlé de soleil, touristes de Rio ou de Sao Paulo vêtus de blanc ainsi que de hauts fonctionnaires et parlementaires en costume sombre.

Cérémonies religieuses, fêtes populaires kermesse, parade militaire, défilé des ouvriers ayant participé à la construction, rythment l’événement pendant plusieurs jours.

Le 21, les pouvoirs sont installés à Brasilia.

« Les façades des édifices publics » et des immeubles d’habitation « sont toutes en baies vitrées. Ainsi, le peuple pourra +contrôler+ constamment le travail des serviteurs de l’Etat », explique l’AFP le 23 avril.

Quatre années après l’inauguration de sa nouvelle capitale, qui a plombé ses finances pour plusieurs années, le Brésil connaît un coup d’Etat, instaurant une dictature militaire jusqu’en 1985.

Cuba sans touristes: le secteur privé comme une âme en peine

La Havane ville morte, les décapotables américaines pour touristes remisées au garage, la plupart des restaurants et cafés fermés: à Cuba, le secteur privé souffre depuis que l’île a fermé ses portes pour contrer la pandémie de coronavirus.

Dans le vieil immeuble plein de charme où a été tourné le film « Fraise et chocolat » en 1993, l’escalier en colimaçon qui mène à La Guarida, plus célèbre « paladar » (restaurant privé) de Cuba, est désert.

Son patron, Enrique Nuñez, a pris les devants: « Nous avons décidé de fermer le restaurant dès le 15 mars », neuf jours avant les premières mesures restrictives des autorités.

L’île de 11,2 millions d’habitants recensait jeudi 862 cas de coronavirus, dont 27 décès.

« J’ai des amis qui ont des restaurants en Espagne, ils m’ont raconté ce qui se passait, le danger de continuer à servir le public dans ces conditions », raconte-t-il à l’AFP.

Son restaurant reçoit environ 200 personnes par repas. Présent dans tous les guides, il est un passage obligé pour nombre de visiteurs étrangers, notamment des stars (Beyoncé, Madonna, Pedro Almodovar…) dont les photos ornent les murs.

« C’était la raison principale pour prendre cette décision, car beaucoup de personnes arrivent à La Havane avec l’envie de connaître La Guarida », confie Enrique: « nous étions en première ligne », alors que les premiers cas recensés étaient des touristes.

– Deux mauvaises années –

Dans ce pays socialiste où l’Etat et ses entreprises dominent l’activité économique, le secteur privé s’est peu à peu fait une place ces dernières années: il emploie aujourd’hui 634.891 personnes, 14,5% des travailleurs cubains.

Ces « cuentapropistas » (employés à leur compte) louent des chambres, tiennent des restaurants, des salons de coiffure…

« Beaucoup de ces commerces privés se sont montés en comptant sur les touristes, car ce n’est vraiment pas un Cubain qui va aller à un paladar dépenser 100 dollars dans un repas », souligne l’économiste Omar Everleny Pérez.

Ils ont donc vite senti le danger: deux jours après la fermeture des frontières aux non-résidents (mesure étendue ensuite à toute entrée sur le territoire), 16.062 travailleurs privés demandaient la suspension de leur licence, selon le ministère du Travail, qui les a exempté temporairement d’impôts.

Mercredi, ils étaient 119.079 à l’avoir fait, soit 19% du total.

Cette crise sanitaire est la pire des nouvelles, car elle s’ajoute à deux mauvaises années pour les entrepreneurs cubains, victimes du renforcement de l’embargo américain sous Donald Trump.

« Le secteur privé allait déjà mal, surtout à La Havane, quand les bateaux de croisière américains ont arrêté de venir », interdits d’escale dès juin 2019, note M. Pérez.

Ces dernières années, les touristes américains étaient devenus les deuxièmes visiteurs de l’île – derrière les Canadiens – après le rapprochement initié fin 2014 entre les deux pays.

– « Sorry, we’re closed » –

Conséquence: en 2019, le nombre de touristes a baissé de 9,3%, à 4,28 millions.

En janvier-février 2020, le recul s’est accentué de 16,5% sur un an, avec une chute de 65% des visiteurs américains. Deuxième source de devises du pays, le secteur rapportait 3,3 milliards de dollars en 2018.

Avant même le coronavirus, « (le volume de clients dans) les restaurants et les ventes n’étaient pas les mêmes qu’il y a deux ans. Et maintenant, le Covid-19 finit de les achever », soupire Omar Everleny Pérez.

L’impact est brutal pour les employés, privés de revenus bien supérieurs au salaire moyen dans le public (50 dollars par mois).

« Sorry, we’re closed » (Désolé, on est fermé), dit le vieux panneau métallique accroché à l’entrée de El Café, cafétéria prisée des touristes dans la vieille Havane, quartier le plus visité et désormais désert.

Loliet Gonzalez, étudiante en psychologie de 25 ans, y travaille comme serveuse depuis deux ans: « Ce que je gagne me permet d’avoir le niveau de vie que je veux », explique-t-elle.

Son patron lui a versé deux semaines de salaire pour tenir pendant cette crise. « Pour l’instant ça va, mais à un moment j’aurai besoin de piocher dans mes économies ».

Masque en tissu sur le visage, Nelson Rodriguez, propriétaire de l’établissement, pense déjà à un avenir où Cuba tardera à voir revenir les visiteurs étrangers.

« S’il n’y a pas de touristes, nous allons nous recentrer sur le public cubain, donc peut-être on devra adapter notre commerce », avec des prix plus accessibles à la population locale, dit-il.

Dans les agences onusiennes, le recul américain favorise l’influence chinoise

Dans les agences onusiennes, comme à l’Organisation mondiale de la Santé vilipendée par Donald Trump pour sa gestion de la crise du Covid-19, la Chine développe depuis des années son influence en profitant du recul des Etats-Unis dans les affaires du monde.

Cette progression lente et continue du « soft power » chinois est multiforme: elle s’appuie sur un engagement financier et militaire, se traduit par le gain de postes partout, de la fonction de stagiaire à celle de directeur d’agence, et par des liens avec tous les acteurs possibles.

Un exemple avec le continent africain. Il y a dix ans, la dette de l’Afrique à l’égard de la Chine était minime. Aujourd’hui, alors que Pékin y multiplie les investissements via son gigantesque programme des Routes de la Soie, elle est d’environ 140 milliards de dollars, relève un responsable onusien.

Autrement dit, un levier puissant pour bénéficier de soutiens africains sur tel ou tel sujet dans telle ou telle instance multilatérale… Dirigée par l’Ethiopien Tedros Adhanom Ghebreyesus, l’OMS est accusée par Washington d’avoir minimisé sous pression de Pékin l’ampleur du virus apparu en Chine.

« Ce que l’on observe depuis plus de dix ans, et notamment depuis 2012 (avec Xi Jinping), c’est un fort activisme de la diplomatie chinoise pour restructurer la gouvernance mondiale. L’ambition est forte puisque la Chine parle de +piloter+ cette restructuration », indique à l’AFP Alice Ekman, responsable de l’Asie à l’Institut européen des études de sécurité (EUISS).

Dans de très nombreuses agences onusiennes, le constat est le même. Les Etats-Unis se replient sur eux-mêmes, la Chine trace son sillon sans jamais recourir à un mouvement frontal.

Outre une mise à disposition de plus en plus de Casques bleus pour les opérations de paix, Pékin est devenu le deuxième contributeur financier à l’ONU à New York après les Etats-Unis, supplantant le Japon.

Dans les agences, l’outil financier est également privilégié, comme à l’Unesco à Paris. Le retrait américain début 2019 de l’Organisation pour l’éducation, la science et la culture, accusée d’être biaisée aux dépens d’Israël, a été de pair avec une influence grandissante de l’Empire du milieu qui y est devenu le premier contributeur net obligatoire.

Pékin est très présent dans les programmes d’éducation des femmes et des filles et le numéro deux de l’Unesco, Xing Qu, est chinois. « On a réussi à trouver un équilibre: ils sont très présents sans imposer quoi que ce soit », assure à l’AFP un responsable sous couvert d’anonymat.

– « Le vide » –

Pour de nombreux fonctionnaires de l’ONU dans le monde, « le vrai sujet, c’est le vide laissé par les autres ».

« Avec les États-Unis qui ne dominent pas sur le plan international, l’Europe se disloquant et la Chine poursuivant ses propres intérêts, nous avons vraiment un problème », résumait jeudi dans le quotidien Washington Post Catia Batista, professeure d’économie à Lisbonne.

A l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) à Rome comme à l’OACI à Montréal (Organisation de l’aviation civile internationale), le pouvoir de la Chine est avéré.

En 2019, le Chinois Qu Dongyu, ex-ministre, a pris la tête de la FAO et l’OACI est co-dirigée depuis 2015 par une de ses compatriotes, Fang Liu. Dans cette agence chargée de réguler le transport aérien, l’influence chinoise est « réelle et croissante », souligne un spécialiste de l’institution, en précisant que Pékin en est désormais le 2e contributeur financier après Washington.

Fin 2019, les Etats-Unis ont suspendu leur contribution financière à l’OACI pour l’accélération de plusieurs réformes. Ils « utilisent leur contribution comme un levier » mais « ce n’est pas un désengagement », veut croire la même source sous couvert d’anonymat.

A l’Unesco, cette tactique américaine ne s’est pas traduite par des conséquences révolutionnaires pour l’organisation, qu’en sera-t-il à l’OMS?

A Vienne, c’est un relatif désintérêt des grandes puissances occidentales pour la petite Organisation des Nations unies pour le développement industriel dans les pays du sud (Onudi) qui a conduit la Chine à l’utiliser comme un « marche-pied » pour son ascension dans les instances de l’ONU.

Lui aussi ex-ministre chinois, Li Yong en est toujours son directeur général depuis son entrée en fonctions en 2013.

Quant à l’AIEA (Agence internationale pour l’énergie atomique), les Etats-Unis, premiers contributeurs financiers devant la Chine, ont beau dire qu’ils n’ont pas perdu d’influence avec le retrait américain de l’accord conclu en 2015 avec Téhéran, la réalité est quelque peu différente avec des Chinois laissés en première ligne avec les Russes et les Européens.

« Après l’élection de Donald Trump, la Chine a renforcé son positionnement comme puissance garante du multilatéralisme », résume Alice Ekman. Selon elle « la crise du Covid-19 est un second événement accélérateur » pour que Pékin continue « à investir dans la gouvernance mondiale dans toutes les directions ». Et « l’OMS n’est qu’une institution parmi d’autres ».

« A terme, la Chine souhaiterait l’avènement d’une gouvernance mondiale post-occidentale, au sein de laquelle elle occuperait un rôle central », estime-t-elle.

burx-prh/cjc/cn

Equateur: cadavres égarés, la tragédie continue après la mort à Guayaquil

Darwin Castillo a littéralement perdu son père dans le chaos du Covid-19 à Guayaquil, une des villes les plus affectées d’Amérique latine. Il est allé en récupérer le corps dans une morgue bondée. Mais le sac mortuaire en contenait un autre.

Plus de deux semaines ont passé. Cet ouvrier de 31 ans ne sait toujours pas où se trouve le cadavre, dans cette ville de la côte Pacifique, épicentre de la pandémie en Equateur. Il a fini par rapporter le cercueil au funérarium.

« Je ne rejette pas la faute sur la morgue ou l’hôpital – il y avait des gens qui mourait dans l’entrée. Je voudrais juste retrouver mon père et lui offrir une sépulture chrétienne, donner un bouquet de roses à mon vieux », a-t-il expliqué à l’AFP.

La frustration se mêle au chagrin. Manuel, son père âgé de 76 ans, était sous dialyse et l’obstruction d’un cathéter a causé sa mort le 31 mars.

Deux jours après, il est allé chercher le corps aux Ceibos, le plus grand hôpital de Guayaquil, où sont regroupés les malades du nouveau coronavirus.

L’Equateur compte plus de 8.000 cas confirmés, dont 400 morts, depuis le 29 février, et au moins 70% dans la province de Guayas, dont le port de Guayaquil est le chef-lieu.

– Un conteneur de cadavres –

Darwin Castillo admet avoir soudoyé un employé de la morgue, avec 150 dollars, pour récupérer son père parmi les 170 cadavres qu’il y avait là, sans compter la cinquantaine d’autres entreposés dans un conteneur frigorifique.

Lorsque le sac mortuaire lui a été remis, il l’a ouvert pour vérifier. Mais il contenait le corps d’un autre, « un homme moustachu avec des vêtements différents ».

« Ce monsieur avait le bracelet d’admission de l’hôpital et il était marqué Rodriguez », se souvient-il. Il lui a lors été proposé de chercher lui-même parmi les morts, dont des victimes du Covid-19.

« S’il n’y avait pas ce problème, j’aurais passé un mort après l’autre pour trouver mon père. Mais je me serais exposé. » Par crainte de la contagion, il a renoncé.

Le chaos hospitalier et funéraire causé par l’épidémie, et aggravé par un couvre-feu de 15 heures, a abouti à ce que des centaines de cadavres attendent plusieurs jours dans les hôpitaux, des logements et jusque dans la rue.

– Localiser les morts enterrés –

Le gouvernement, dont une force spéciale a retiré près de 1.400 corps ces dernières semaines à Guayaquil, indique sur une page web où ils ont été enterrés. Deux cimetières ont été agrandis à cette fin.

Darwin y a cherché son père, en vain.

Il y a d’autres familles dans la même situation. Certaines s’organisent pour déposer plainte contre l’Etat.

« On ne comprend pas comment les services funéraires n’ont pu rendre le cadavre, ou l’ont perdu, ou l’ont confondu », a déclaré à l’AFP leur avocat, Hector Vanegas, par ailleurs conseiller municipal de Guayaquil.

« Les proches disent que les morts leur parviennent sous une autre identité, ou des hommes à la place de femmes », ajoute-t-il, soulignant que « la famille a le droit de connaître le sort de son parent décédé ».

Me Vanegas est en train d’établir une liste des personnes concernées et a déjà reçu 190 appels téléphoniques, certains non fondés.

Moisés Valle, 37 ans, a aussi perdu son père, décédé d’un infarctus à l’hôpital Teodoro Maldonado Carbo. Alors que cet employé de pharmacie faisait les démarches pour récupérer le corps, il a appris qu’il avait été entreposé dans le conteneur d’un autre établissement.

– Des corps putréfiés –

« Depuis, c’est un calvaire (…) le nom de mon père n’apparaît pas sur la page web », déplore-t-il. Tout était prêt pour l’enterrement qu’il a dû annulé.

Dayana, qui tait son nom de peur de représailles, travaille pour une entreprise funéraire. Les derniers jours de mars ont été exténuants et traumatisants.

« Je rentrais chez moi morte de fatigue, pleurant de tout ce que je voyais… les cadavres pourrissant, remplis de vers », dit-elle.

Elle allait à l’hôpital avec quatre cercueils à la fois. Mais cela ne suffisait jamais. Les appels à l’aide des familles retentissent encore dans sa tête.

« J’ai besoin d’un psychologue et j’en ai besoin vite de voir tant d’horreur », ajoute cette jeune femme de 29 ans, qui fait en outre état de « beaucoup de corps non identifiés » et d’autres remis sans qu’aucun document soit signé.

Et les familles endeuillées ressentent ce vide de ne pas savoir où sont leurs morts.

Coronavirus: le point sur la pandémie dans le monde

Nouveaux bilans, nouvelles mesures, faits marquants: un point sur les dernières évolutions de la pandémie de Covid-19, qui a contaminé plus de 2 millions de personnes dans le monde.

– Près de 93.000 morts en Europe –

Plus de 2.135.410 cas du nouveau coronavirus ont été officiellement déclarés dans le monde, dont au mois 141.127 décès, selon un comptage AFP jeudi à 19H00 GMT à partir de sources officielles.

Les Etats-Unis paient le plus lourd tribut, avec 31.590 décès.

Suivent l’Italie (avec 22.170 morts), l’Espagne (19.130), la France (17.920) et le Royaume-Uni (13.729).

La Belgique, qui revendique une « transparence maximale » sur la situation dans les maisons de retraite, affiche une des plus fortes mortalités en Europe (4.857 décès pour une population de 11,5 millions d’habitants).

– Brésil : ministre limogé –

Le populaire ministre de la Santé du Brésil, Luiz Henrique Mandetta, a annoncé sur Twitter qu’il avait été limogé par le président Jair Bolsonaro, avec qui il avait de profondes divergences sur la lutte contre la pandémie de coronavirus.

– Déconfinements progressifs –

La Suisse a annoncé un déconfinement « lent » et « progressif » à compter du 27 avril, tandis que l’Allemagne compte rouvrir prochainement certains magasins et, à partir du 4 mai, écoles et lycées.

L’Afrique du Sud a autorisé la reprise partielle des activités minières.

– Plus de 4,4 milliards de confinés –

Plus de 4,4 milliards de personnes, soit près de 57% de la population mondiale, sont appelées ou contraintes par leurs autorités à rester chez elles, selon un comptage réalisé jeudi à partir d’une base de données de l’AFP. Près de 110 pays ou territoires sont concernés.

Le confinement est prolongé jusqu’au 15 mai dans l’Etat de New York (Etats-Unis) et d’au moins trois semaines au Royaume-Uni.

Le gouvernement japonais a étendu l’état d’urgence à l’ensemble de l’archipel nippon.

– Un choc pétrolier d’ampleur planétaire –

Le marché pétrolier subit « un choc historique, brutal, extrême et d’ampleur planétaire », a estimé l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) qui prévoit un effondrement « historique » de la demande mondiale de pétrole en 2020.

– Enquête sur l’origine du Covid-19 –

Les Etats-Unis ont lancé une « enquête exhaustive » pour faire la lumière sur l’origine du Covid-19, disant ne pas exclure que le virus provienne d’un laboratoire de Wuhan (centre de la Chine).

– « Zones d’ombre » en Chine –

Le président français Emmanuel Macron a estimé dans un entretien au Financial Times qu’il existait des zones d’ombre dans la gestion de l’épidémie de coronavirus par la Chine, alors que le Royaume-Uni a averti la Chine qu’elle devrait répondre à des « questions difficiles » sur la gestion du virus.

– Appel à la rescousse financière –

Le maire de New York a lancé un appel à l’aide à Donald Trump, enjoignant le président américain de débloquer des milliards de dollars pour aider la capitale financière américaine à surmonter la crise.

– Le G7 se coordonne –

Les dirigeants du G7 se sont engagés à travailler ensemble à la réouverture de leurs économies.

L’Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE) a appelé à renforcer l’aide publique aux pays en développement les plus touchés par l’épidémie.

– Décès de Luis Sepulveda –

L’écrivain chilien engagé Luis Sepulveda, 70 ans, auteur du best-seller « Le vieux qui lisait des romans d’amour », est décédé en Espagne du Covid-19.

– Traçage et port du masque –

La Norvège, un des premiers pays d’Europe à alléger les mesures de confinement, a lancé une nouvelle application mobile de traçage.

Les Polonais sont désormais obligés de se couvrir le nez et la bouche dans l’espace public, avec un masque ou un foulard.

burs-fm/ber/mba

Coronavirus: sous le feu des critiques, la Chine révise ses bilans et appelle à l’unité

La Chine a révisé vendredi à la hausse le nombre de ses victimes du coronavirus et appelé à l’unité internationale, après des accusations nourries sur son manque de transparence quant à l’apparition de cette maladie qui paralyse depuis des semaines l’économie mondiale.

Depuis son apparition fin 2019 à Wuhan, la métropole du centre du pays, le coronavirus a infecté plus de 2 millions de personnes à travers le monde, conduit au confinement inédit de plus de 4,4 milliards de personnes et mis au chômage partiel ou total des dizaines de millions d’entre elles, dont 22 millions rien qu’aux Etats-Unis.

Alors que les conditions de sortie de cette crise sanitaire semblent incertaines, le président français Emmanuel Macron a mis en cause Pékin jeudi, emboîtant le pas aux dirigeants américains.

Il y a « manifestement des choses qui se sont passées qu’on ne sait pas », a-t-il déclaré au quotidien britannique Financial Times, mettant aussi en doute le bilan affiché par la Chine en termes de victimes.

A Londres, le ministre des Affaires étrangères Dominic Raab a aussi déclaré que Pékin devrait répondre à des « questions difficiles concernant l’apparition du virus et pourquoi il n’a pas pu être stoppé plus tôt ».

Face à ces critiques, un porte-parole de la diplomatie chinoise, Zhao Lijian, a estimé vendredi « impératif que tous les pays s’unissent pour combattre l’épidémie » et démenti toute « dissimulation » dans le bilan chinois des victimes.

Un peu plus tôt, la mairie de Wuhan avait créé la surprise en révisant à la hausse le nombre de décès intervenus sur son territoire, annonçant 1.290 morts supplémentaires tout en expliquant leur non comptabilisation initiale par le fait qu’ils étaient décédés chez eux et non à l’hôpital.

Ce nouveau décompte porte à 4.632 le bilan des décès enregistré dans le pays le plus peuplé du monde.

– Échappé d’un laboratoire ? –

Le nouveau coronavirus est soupçonné d’être apparu dans un marché en plein air de Wuhan où des animaux exotiques étaient vendus vivants. D’origine animale et proche d’un virus présent chez des chauves-souris, il aurait pu s’y transmettre à l’Homme et muter.

Mais des médias américains ont ouvert une autre piste. Selon le Washington Post, l’ambassade des Etats-Unis à Pékin avait alerté Washington il y a deux ans sur les mesures de sécurité insuffisantes dans un laboratoire local qui étudiait les coronavirus chez les chauves-souris.

Et d’après Fox News, le coronavirus actuel émanerait de ce laboratoire, même s’il s’agirait bien d’un virus naturel – et non un agent pathogène créé par les Chinois – et que sa « fuite » serait involontaire.

L’économie mondiale continue de subir de plein fouet les conséquences du confinement décrété un peu partout pour tenter d’enrayer la progression du virus.

L’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) a estimé jeudi que le marché pétrolier subissait « un choc historique, brutal, extrême et d’ampleur planétaire ».

Les chiffres de la croissance chinoise publiés vendredi montrent un PIB en recul de 6,8% sur un an au 1er trimestre, du jamais vu depuis l’établissement des statistiques trimestrielles au début des années 1990.

Aux Etats-Unis, où des pans entiers de l’économie sont en sommeil, le président Donald Trump a présenté jeudi un plan pour faire « redémarrer l’Amérique ».

Il a estimé que les Etats « en bonne santé » pouvaient redémarrer « littéralement dès demain », avant l’échéance du 1er mai un temps évoquée, mentionnant le Montana, le Wyoming ou le Dakota du Nord, relativement épargnés.

En Europe, le marché automobile s’est effondré de 55,1% en mars. Celui du mariage ne se portait pas mieux. « 80 à 85% des mariages sont célébrés entre mars et septembre: ça ne pouvait pas tomber plus mal », grince le fondateur du Salon du mariage en France, Stéphane Seban.

A Hollywood, c’est un autre secteur d’activité qui souffre. Depuis que les stars restent cloîtrées, les paparazzis d’Hollywood n’ont plus le moral, ni beaucoup d’activité. « Toutes les photos en ce moment, c’est avec des lunettes de soleil et un masque sur le visage… On ne peut guère espérer mieux », regrette Randy Bauer, fondateur de la célèbre agence photo Bauer-Griffin.

Les dirigeants du G7 se sont engagés jeudi à travailler ensemble à la réouverture de leurs économies alors que du côté européen, les autorités avancent vers le déconfinement en ordre dispersé.

Le Danemark a rouvert ses écoles mercredi, l’Autriche et l’Italie certains de leurs magasins non essentiels et la Suisse a annoncé un déconfinement « lent » et « progressif » à compter du 27 avril.

L’Allemagne compte rouvrir prochainement certains magasins et, à partir du 4 mai, écoles et lycées. Selon son ministre de la Santé Jens Spahn vendredi, l’épidémie y est désormais « sous contrôle et gérable » avec un taux d’infection inférieur à 1.

Mais la pandémie est loin d’être jugulée en Europe, a averti l’Organisation mondiale de la santé (OMS), en notant des « chiffres constants ou accrus » dans l’est du continent et au Royaume-Uni où le gouvernement a décidé jeudi de prolonger le confinement « pour au moins trois semaines ».

– Distribution de masques –

Au Japon, le gouvernement a étendu jeudi l’état d’urgence à l’ensemble de l’archipel où la pandémie est en phase d’accélération.

La poste japonaise a débuté vendredi la distribution des deux masques réutilisables par foyer, en commençant par Tokyo.

« Je pense que cela ne fera pas de mal car on peut les laver et les réutiliser et cela peut bloquer les gouttelettes quand vous toussez », a dit à l’AFP Yohei Ono, 26 ans.

Plus de 2.135.410 cas du nouveau coronavirus ont été officiellement déclarés dans le monde, dont au moins 141.127 décès, selon un comptage AFP jeudi à 19H00 GMT.

Les Etats-Unis paient le plus lourd tribut, avec près de 33.000 décès pour 667.800 cas. Suivent l’Italie (22.170 morts), l’Espagne (19.130), la France (17.920) et le Royaume-Uni (13.729).

L’Amérique latine n’est pas épargnée.

Darwin Castillo, ouvrier équatorien de 31 ans, a littéralement perdu son père dans le chaos du Covid-19 à Guayaquil, une des villes les plus affectées d’Amérique latine: il est allé récupérer son corps dans une morgue bondée. Mais le sac mortuaire contenait une autre victime.

« Je ne rejette pas la faute sur la morgue ou l’hôpital – il y avait des gens qui mouraient dans l’entrée. Je voudrais juste retrouver mon père et lui offrir une sépulture chrétienne, lui donner un bouquet de roses », a-t-il expliqué à l’AFP.

burs-oaa/jhd

Coronavirus: quels remboursements de voyage en cas de fermeture de frontière ?

L’annonce surprise par Donald Trump d’une suspension pour trente jours de l’entrée aux Etats-Unis des voyageurs ayant récemment séjourné en Europe va se traduire par d’importantes annulations de voyages.

Cette mesure vient s’ajouter à celles prises par de nombreux autres pays vers lesquels les possibilités de voyages sont limitées. Les voyageurs peuvent-ils espérer être remboursés ?

Côté assurances, rien n’est moins sûr, ce type d’annulation étant généralement hors des garanties.  Reste à se tourner vers les voyagistes et les compagnies aériennes. Il faut distinguer de multiples cas de figure.

Avec une assurance annulation voyage

En principe, l’assurance voyage ne couvre généralement pas ce type d’annulation. Elle protège le voyageur seulement « contre un risque qu’il aurait lui-même de ne pouvoir voyager à la suite d’un décès, d’un accident, d’un problème de santé… », précise à l’AFP l’assureur Allianz.

Dans le cas où le pays a décidé d’interdire les voyages depuis l’Europe ou la France, les voyageurs « doivent contacter la compagnie aérienne ou l’agence de voyage auprès de laquelle ils avaient acheté leur billet d’avion qui leur apportera toutes les précisions nécessaires », ajoute Allianz.

Les garanties de la carte de paiement

Là encore, la décision d’un pays de fermer ses frontières ne permet pas au voyageur de faire jouer les garanties adossées à leurs cartes de paiement.

« Les assurances des cartes Visa ne couvrent pas les annulations et modifications de voyages pour cette raison. Si un porteur de carte souhaite annuler ou modifier son itinéraire, il doit contacter les professionnels du voyage (compagnies aériennes, hôtel, etc.) auprès desquels il a effectué sa réservation pour se renseigner sur les conditions de modification ou d’annulation », a répondu par écrit à l’AFP  le géant américain des services de paiement Visa.

De son coté, le groupe Mastercard, l’autre grand fournisseur mondial de cartes de paiement, renvoie les voyageurs au contrat qu’ils ont signé auprès de leur banque.

« On demande aux banques de mettre une assurance annulation voyage en place notamment en cas d’accident grave de voyageur, en cas de maladies soudaines, après il y a un certain nombre d’exclusions qui vont varier un peu en fonction du contrat souscrit par la banque auprès de son assureur », a expliqué à l’AFP un porte-parole de Mastercard.

Le cas des voyages « à forfait »

Le voyage à forfait est caractérisé par l’achat chez un professionnel du tourisme d’au minimum deux services de voyage (transport, hébergement…).

Dans ce cas, deux cas de figure se profilent, celui d’une annulation en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, et celui d’une annulation sans circonstances exceptionnelles et inévitables.

Il reviendra à la justice de dire si la survenue du coronavirus COVID-19 est une circonstance exceptionnelle et inévitable. Dans l’affirmative, le voyageur aura droit à un remboursement intégral par le professionnel du tourisme, souligne la FFA.

Cette annulation et ce remboursement peuvent être à l’initiative du professionnel du tourisme comme du voyageur. Le remboursement est alors réalisé sur le prix de l’ensemble du forfait.

Dans le cas d’une annulation sans circonstances exceptionnelles et inévitables à l’initiative du voyageur, celui-ci peut demander l’annulation du voyage à forfait.

Le vendeur du voyage à forfait rembourse alors le voyage en soustrayant au préalable des frais de dossiers appropriés et justifiables.

Si l’annulation est à l’initiative du transporteur aérien, le voyageur a droit au remboursement du prix du forfait ainsi qu’à un dédommagement complémentaire.

L’annulation d’une liaison aérienne

Si l’annulation d’un voyage par avion est à l’initiative du voyageur et si le vol est maintenu par la compagnie aérienne, sauf disposition contractuelle contraire, le voyageur ne peut pas exiger le remboursement intégral du billet de transport, écrit encore la Fédération française de l’assurance sur son site.

Si l’annulation est à l’initiative du transporteur aérien, celui-ci rembourse intégralement le prix du billet d’avion sans indemnisation complémentaire lorsque l’annulation est due à une circonstance extraordinaire. Il peut également proposer de nouvelles dates de vol.

De nombreuses compagnies proposent la possibilité de reporter les voyages sans frais.

En parallèle, l’Apra, une association de défenseurs des droits des passagers, a toutefois estimé vendredi que le Covid-19 devait être considéré comme « une circonstance extraordinaire » n’ouvrant pas droit à une demande d’indemnisation des passagers en cas d’annulation pour « soutenir l’industrie du voyage » dans une crise qui « doit être qualifiée de force majeure ».