La diffusion de vidéos intimes a poussé Benjamin Griveaux à renoncer à briguer la mairie de Paris vendredi. Deux jours après le coup de tonnerre de son retrait, voici ce que l’on sait de cette affaire aux retentissements politique et judiciaire :
. De quoi parle-t-on ?
Vendredi matin, Benjamin Griveaux, 42 ans, a annoncé qu’il se retirait de la course à la mairie de Paris. Le renoncement de l’ex-candidat LREM, un des piliers de la Macronie, est la conséquence de la diffusion sur internet de vidéos intimes.
A l’origine, les vidéos adressées à une femme d’un homme se masturbant – dont on ne voit pas le visage, mais attribuées à Benjamin Griveaux – ont été mises en ligne mercredi soir sur un site créé ad hoc et devenu depuis inaccessible.
Partagées au départ par une poignée de politiques dans des messages privés, elles ont ensuite été relayées sur les réseaux sociaux, notamment par le député ex-LREM Joachim Son-Forget.
Samedi après-midi, Benjamin Griveaux a porté plainte contre X et le parquet de Paris a ouvert une enquête.
. Qui est à l’origine de cette diffusion ?
Dès vendredi matin, un artiste russe contestataire, Piotr Pavlenski, a revendiqué être à l’origine de la publication des vidéos incriminées. Il la justifie en dénonçant « l’hypocrisie » de Benjamin Griveaux.
Ce dernier « a utilisé sa famille en se présentant en icône pour tous les pères et maris de Paris. Il a fait de la propagande des valeurs familiales traditionnelles », a affirmé le Russe.
Cet homme, réfugié politique en France depuis mai 2017, a déjà eu affaire à la justice française pour avoir incendié la façade d’une succursale de la Banque de France en octobre de la même année, dans le cadre d’une « performance artistique ». Il a été condamné en janvier 2019 à trois ans de prison, dont deux avec sursis.
Il a été placé en garde à vue samedi après-midi, dans le cadre d’une autre enquête ouverte pour des violences commises le soir du 31 décembre dans un appartement parisien. Celle-ci a été suspendue dimanche pour permettre de l’interroger sur l’affaire Griveaux dans le cadre d’une autre garde à vue. Au total, il ne peut pas rester plus de 48 heures en garde à vue à compter du début de la première, soit jusqu’à lundi après-midi.
Dans son pays, l’artiste de 35 ans, qui s’est fait connaître pour des « performances » choc comme le fait de se coudre les lèvres en soutien au groupe contestataire Pussy Riot, avait déjà mis le feu à l’une des portes de la Loubianka, le siège historique des services de sécurité russes, en mai 2015. Après sept mois de détention préventive, il avait été condamné à une simple amende dans une décision d’une rare clémence pour la justice russe.
L’avocat de Benjamin Griveaux, Me Richard Malka, a dénoncé samedi soir la justification « grotesque » de M. Pavlenki.
« Ce que je vois, c’est qu’un individu, assez trouble manifestement, revendique les faits mais que, manifestement aussi, il ne peut pas être le seul impliqué compte tenu de ce que ça coûte comme opération, de sa maîtrise de la langue française, il ne peut pas être tout seul », a-t-il ajouté sur LCI.
. Piotr Pavlenski a-t-il agi seul ?
Depuis samedi soir, sa compagne a également été placée en garde à vue, cette fois spécifiquement dans le cadre de l’enquête qui concerne les vidéos incriminées. Selon une source proche du dossier, c’est elle qui aurait été la destinataire desdites vidéos.
Cette femme est en garde à vue pour « atteinte à l’intimité de la vie privée » et « diffusion sans l’accord de la personne d’images à caractère sexuel », a-t-on appris auprès du parquet de Paris.
L’avocat de Piotr Pavlenski, Me Juan Branco, a expliqué vendredi avoir été « approché » par l’artiste pour « avoir un avis juridique sur la situation » et « vérifier la fiabilité » de la vidéo avant sa diffusion. Il dément en revanche tout rôle dans la divulgation de la vidéo.
Depuis 2016 et l’adoption de la loi « pour une République numérique », la diffusion de « revenge porn » ou « vengeance pornographique » est passible de deux ans d’emprisonnement et 60.000 euros d’amende en France.
. Quelles conséquences politiques ?
Le renoncement de Benjamin Griveaux oblige le parti présidentiel et ses alliés centristes à trouver un autre candidat pour tenter de conquérir la mairie de Paris, à moins d’un mois du scrutin.
Des réunions ont lieu ce week-end au siège de LREM pour parvenir à un consensus sur un successeur et l’objectif est d’avoir un candidat lundi, alors que la date limite du dépôt des listes est fixée au 27 février.
Parmi les noms cités figurent ceux de l’ex-ministre Mounir Mahjoubi, du porte-parole du groupe LREM au Sénat Julien Bargeton, et celui de son homologue à l’Assemblée Sylvain Maillard. Le nom de la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, circule, même si cette option est jugée quasi impossible en raison de son agenda chargé.