Battant du tambour ou portant des masques chirurgicaux contre le « patriarcavirus », des centaines de milliers de manifestantes ont déferlé dans les rues d’Espagne dimanche pour la journée internationale des droits des Femmes.
« Le machisme tue plus que le coronavirus », pouvait-on lire sur l’une des pancartes qui émergeaient de la marée violette, couleur du féminisme, qui a traversé Madrid en fin de journée.
Quelque 120.000 personnes ont marché, crié, chanté ou dansé dans les rues de la capitale pour réclamer l’égalité et la sécurité pour les femmes du monde entier, selon les chiffres de la préfecture de Madrid, soit nettement moins que les 350.000 recensées l’an dernier.
« Cette année je devais venir avec deux collègues de travail. Mais en fin de compte, elle ne sont pas venues à cause du coronavirus. Elles ont des proches fragiles, c’est pour éviter de possibles contaminations », a déploré comme de nombreuses autres manifestantes la madrilène Beatriz Casado Gomez, 59 ans, venue avec ses deux filles.
– « Machismovirus » –
Mais plutôt que d’avoir peur du nouveau coronavirus, de nombreuses manifestantes ont récupéré et détourné l’épidémie mondiale avec d’autres slogans tels que « Y en a marre de satisfaire le machismovirus ».
« Patriarcavirus », pouvait-on lire aussi sur le masque sanitaire d’une manifestante, alors que le hashtag #patriarcavirus » est devenu viral sur Twitter après sa diffusion par un collectif féministe de Madrid cette semaine.
Le chant « Un violeur sur ton chemin », devenu un hymne féministe viral après son succès au Chili fin 2019, a lui aussi été entonné et chorégraphié plusieurs fois dans la journée aux quatre coins du pays.
Étudiante mexicaine de 21 ans à Madrid, Lily Quintero, a confié en défilant dans le cortège de la capitale qu’elle avait le 8 mars en tête avant d’arriver en Espagne: « J’avais lu sur les manifestations féministes ici à Madrid, surtout le 8 mars. Alors quand j’ai choisi de venir en échange universitaire, je savais que ce serait une opportunité ».
– L’Espagne comme référence –
En Espagne, le 8 mars est devenu un rendez-vous incontournable pour les féministes depuis 2018 lorsque une grève massive avait été suivie et des centaines de milliers de personnes avaient défilé dans les rues.
Cette année, l’édition a été marquée par un appel national des organisations féministes à « une révolte féministe » et « sans frontière », comprenant notamment des appels à un féminisme plus inclusif vis-à-vis des personnes transgenres.
« Avec un pénis ou avec un vagin, les femmes sont combatives ! », pouvait-on entendre chanté en tête de cortège. Un appel à la solidarité vis-à-vis des femmes migrantes à la frontières greco-turques a également été diffusé nationalement.
Des dizaines de manifestations ont eu lieu dans tout le pays, et notamment dans les grandes villes comme Barcelone et Séville, où elles ont mobilisé chaque fois des dizaines de milliers de personnes.
Considérée comme pionnière depuis l’adoption de la loi de 2004 sur les violences de genre, l’Espagne compte un puissant mouvement féministe et dispose par ailleurs d’un observatoire public de ces crimes et délits qui a comptabilisé 1.047 féminicides dans le pays depuis 2003, dont certains noms dépassaient de la foule dimanche à Madrid.