Le Premier ministre du Lesotho Thomas Thabane, sur le point d’être inculpé du meurtre de sa précédente épouse vendredi, est « parti » pour l’Afrique du Sud voisine, officiellement pour « raisons médicales », nouveau coup de théâtre dans ce feuilleton politico-judiciaire.
Lipolelo Thabane, âgée de 58 ans, a été assassinée le 14 juin 2017 alors qu’elle rentrait chez elle en voiture dans la capitale Maseru. Ce crime est intervenu deux jours seulement avant la prestation de serment de Thomas Thabane au poste de Premier ministre. Le couple était alors en instance de divorce.
Après avoir piétiné pendant plus de deux ans, l’enquête s’est accélérée ces dernières semaines.
La nouvelle épouse de Thomas Thabane, Maesaiah, âgée de 43 ans, a été inculpée début février du meurtre de sa rivale. Elle est actuellement en liberté sous caution, une mesure qui a choqué dans le petit royaume d’Afrique australe.
Vendredi, le Premier ministre lui-même était convoqué devant un tribunal de Maseru pour se voir notifier formellement son inculpation pour meurtre dans cette même affaire. Mais il ne s’est pas présenté.
« Il ne vient pas au tribunal, il est parti pour un contrôle médical en Afrique du Sud », a déclaré à l’AFP son secrétaire, Thabo Thakalekoala, précisant que Thomas Thabane, âgé de 80 ans, était arrivé jeudi en Afrique du Sud voisine.
« C’est un contrôle de routine. Il va régulièrement en Afrique du Sud », a ajouté Thabo Thakalekoala. « Quand les médecins estimeront qu’il va bien, ils le laisseront partir », a-t-il encore dit.
Jeudi, le numéro deux de la police Paseka Mokete avait annoncé qu’en accord avec l’avocat du Premier ministre, Thomas Thabane devrait « comparaître devant la justice » vendredi pour être « formellement inculpé » du « meurtre » de Lipolelo Thabane.
Mais vendredi, la police, les journalistes et les curieux qui se pressaient au tribunal de Maseru sont restés sur leur faim.
« Nous avons été informés qu’il est parti pour un contrôle médical de routine », a déclaré à la presse Paseka Mokete. « Selon des sources, il est en Afrique du Sud. On attend de parler avec son avocat qui doit nous dire où il se trouve exactement », a-t-il ajouté.
« Nous avons beaucoup d’éléments contre le Premier ministre. Son téléphone n’est pas la seule preuve que vous avons. Il y a plein d’autres preuves », a-t-il affirmé sans plus de détails.
Un appel téléphonique suspect, passé depuis le téléphone portable du Premier ministre, a été localisé à l’endroit du meurtre le jour du crime, selon la police.
– Démission –
Empêtré dans ce scandale à la tête de l’Etat, le parti de Thomas Thabane, la Convention de tous les Basotho (ABC), fait pression depuis des semaines sur le Premier ministre pour qu’il démissionne.
En début de semaine, il lui a donné un ultimatum lui ordonnant de quitter son poste d’ici à jeudi.
Jeudi précisément, Thomas Thabane a fait une allocution à la nation pour annoncer qu’il démissionnerait d’ici « fin juillet », invoquant son âge avancé.
« La réalité est qu’à mon âge, j’ai perdu l’essentiel de mon énergie », a-t-il expliqué.
Le Lesotho, petit pays d’Afrique australe enclavé dans l’Afrique du Sud, est coutumier des épisodes d’instabilité politique.
Au cours de la dernière décennie, aucun Premier ministre n’a fini son mandat de cinq ans.
Avant de prendre ses fonctions de chef de gouvernement en juin 2017, Thomas Thabane avait déjà occupé ce poste de 2012 à 2015. Il avait été contraint momentanément à l’exil en Afrique du Sud après une tentative de coup d’Etat militaire en 2014.
Lors de sa dernière investiture, le 16 juin 2017, organisée deux jours seulement après le meurtre de Lipolelo Thabane, Thomas Thabane avait prêté serment aux côtés de celle qui allait devenir sa nouvelle épouse, Maesaiah.
Le couple a ensuite assisté aux obsèques de Lipolelo Thabane, avant de convoler en justes noces deux mois plus tard.