L’Iran a annoncé le lancement « avec succès » mercredi d’un premier satellite militaire, deux mois après l’échec de la mise en orbite d’un satellite scientifique et dans un contexte de tensions avec Washington qui perdurent malgré la pandémie de coronavirus.
L’annonce a été faite par les Gardiens de la Révolution, l’armée idéologique de la République islamique qui a salué sur son site internet « une grande réussite et un nouveau développement dans le domaine de l’espace pour l’Iran islamique ».
Le satellite, baptisé Nour, a été « lancé avec succès ce matin, mercredi 22 mai, à partir du lanceur à deux étages Qassed depuis le désert de Markazi (centre) en Iran », a indiqué le site Sepahnews, organe des Gardiens.
Le satellite Nour (Lumière en persan) a « orbité autour de la Terre à 425 km », selon la même source.
Ce lancement survient plus de deux mois après l’échec le 9 février de la mise en orbite d’un satellite d’observation scientifique, baptisé Zafar (Victoire en persan).
Le lancement du Zafar avait été condamné par la France et les Etats-Unis qui ont accusé Téhéran de vouloir renforcer ses compétences dans le domaine des missiles balistiques par le biais du lancement de satellites.
Téhéran maintient que son programme spatial est « pacifique » et réfute les affirmations selon lesquelles il a une dimension militaire.
Les Etats-Unis avaient déjà mis en garde contre le programme spatial iranien, qualifiant notamment le tir par Téhéran d’une fusée chargée du lancement d’un satellite en janvier 2019 de « provocation » et de violation de la résolution 2231 du Conseil de sécurité des Nations unies.
Cette résolution appelle l’Iran à « ne mener aucune activité liée aux missiles balistiques conçus pour pouvoir emporter des charges nucléaires, y compris les tirs recourant à la technologie des missiles balistiques ».
Affirmant n’avoir aucun projet de se doter de l’arme atomique, Téhéran assure que ses programmes balistique et spatial sont licites et ne violent pas la résolution.
– En pleine pandémie –
L’hostilité de longue date entre Téhéran et Washington a été exacerbée depuis que Washington a décidé en mai 2018 de dénoncer unilatéralement l’accord international sur le nucléaire iranien (conclu en 2015) et de rétablir des sanctions économiques punitives contre Téhéran.
Les tensions ont atteint un nouveau pic après l’élimination du puissant général iranien Qassem Soleimani, tué dans une frappe de drone américaine à Bagdad le 3 janvier.
L’annonce du lancement du satellite militaire mercredi intervient sur fond de grave crise sanitaire en Iran, pays parmi les plus touchés par la pandémie du nouveau coronavirus.
La République islamique accuse les États-Unis de « terrorisme économique », Téhéran devant faire face à la fois à l’épidémie et aux sanctions américaines qui étouffent son économie depuis leur retour en 2018.
Depuis plusieurs semaines, l’Iran estime que les sanctions américaines contre Téhéran affaiblissent sa capacité à lutter contre la pandémie.
Celles-ci asphyxient financièrement le pays et restreignent ses capacités à emprunter sur le marché international.
Sur le papier, les biens humanitaires (médicaments, équipements médicaux notamment) échappent aux sanctions, mais en réalité, les banques internationales préfèrent généralement refuser une transaction impliquant l’Iran, quel que soit le produit concerné, plutôt que de courir le risque de s’exposer à des représailles des Etats-Unis.
Téhéan a annoncé en mars avoir demandé au Fonds monétaire international (FMI) une ligne de crédit d’urgence pour un montant pouvant s’élever à environ 5 milliards de dollars.
Mais Washington, qui dispose d’un droit de veto au sein de cette institution et mène une campagne de « pression maximale » contre l’Iran, a jusqu’à présent indiqué n’avoir aucune intention d’autoriser un tel prêt, accusant Téhéran d’utiliser ses ressources pour financer « le terrorisme à l’étranger ».
L’Iran a enregistré officiellement près de 5.300 morts du nouveau coronavirus et environ 85.000 cas de contamination, soit le bilan le plus lourd du Moyen-Orient.
Certains, à l’étranger comme à l’intérieur du pays, estiment que ces chiffres sont sous-estimés, évoquant quatre à cinq fois plus de morts.