Une quinzaine d’organisations de la société civile nigérienne ont exprimé leur inquiétude face à la dégradation de l’espace civique.
Regroupées au sein du mouvement « Tournons La Page », ces organisations ont fait part de leur inquiétude dans un rapport de 236 pages distribué à la presse lundi 13 juin 2022.
« Par un arsenal juridique de plus en plus répressif remettant en cause les droits fondamentaux, les engagements internationaux du pays et l’indépendance de la justice, le Niger avance vers une fermeture irréversible de l’espace civique », ont déploré les organisations de la société civile.
« Entre arrestations de masse d’activistes, journalistes ou opposants politiques, l’interdiction systématique de manifester et coupures d’internet, les libertés d’expression, de manifestation, d’association et de vie privée ne sont désormais plus garanties », ont-elles observé.
Selon les organisateurs membres de « Tournons La Page », depuis 2014, au moins cinquante-trois (53) manifestations ont été interdites au Niger et plus de mille (1000) personnes ont été incarcérées, dont certaines pendant plusieurs mois, à cause de leurs opinions ou lors des manifestations interdites.
Entre autres recommandations, les organisations de la société civile ont demandé à l’État du Niger de « veiller au respect des engagements pris en matière de droits humains, dont les libertés d’expression, d’opinion, de réunion, de manifestation et de circulation » et aux partenaires du Niger de « mettre en place une conditionnalité des soutiens qu’ils apportent à l’État du Niger à la bonne gouvernance et au respect des droits humains et de l’État de droit ».
Aucune réaction n’a été enregistrée de la part des autorités nigériennes au sujet du rapport de la société civile, lundi à 15h GMT.
Lors d’une visite au Niger en décembre dernier, le rapporteur spécial de l’ONU sur le droit à la liberté de réunion pacifique et d’association, Clément Voule, a exprimé sa préoccupation par rapport aux interdictions de manifestations. « Il est inquiétant de constater que depuis 2018, toute demande de manifestation visant à exprimer des points de vue opposés sur la façon dont le pays est gouverné a été systématiquement interdite avec pour motifs la crise sécuritaire ou l’urgence sanitaire liée à la pandémie de la Covid-19 », a-t-il expliqué.
« Bien que la crise sécuritaire soit préoccupante, elle ne justifie pas à elle seule l’interdiction systématique des manifestations publiques. C’est en période de crise que les citoyens ont le plus besoin de s’exprimer sur la manière dont cette crise est gérée à travers l’exercice de leur droit de réunion pacifique », a estimé l’expert onusien.