Ouagadougou, 30 janvier 2025 — Dans un geste chargé de symboles, le Président du Faso, Ibrahim Traoré, a reçu des mains du ministre de la Sécurité, Mahamoudou Sana, son passeport biométrique de la Confédération des États du Sahel (AES). Un acte qui transcende la simple formalité administrative pour s’ériger en pierre angulaire d’une reconfiguration géopolitique audacieuse. en effet, ce sésame électronique, frappé aux couleurs de l’AES, incarne l’ambition d’une intégration régionale érigée en credo souverainiste.
Passeport AES : un sceptre numérique pour une nouvelle ère
Lors d’une cérémonie dépouillée, mais empreinte de solennité, Traoré s’est prêté à l’enrôlement biométrique, ritualité moderne où iris et empreintes digitales se muent en sceaux d’appartenance. « Ce passeport n’est pas un simple carnet, mais un manifeste politique gravé dans le silicium », a déclaré le ministre Sana, en remettant le document. Une allocution dans laquelle transparaissait l’ivresse d’une rupture : celle d’avec la CEDEAO, perçue comme un vestige d’un ordre régional jugé caduc.
La CEDEAO, un passé en sursis ?
Si les anciens passeports ouest-africains gardent provisoirement leur validité, l’AES souffle un vent d’obsolescence programmée sur ces reliques bureaucratiques. Les citoyens burkinabè, maliens et nigériens, piliers de cette confédération en gestation, sont exhortés à troquer leurs vieux livrets contre ce nouvel artefact numérique. Un appel à « migrer vers l’avenir » qui résonne comme un mantra pan-sahélien, même si les autorités temporisent : aucune précipitation n’est requise, les documents actuels demeurant valides jusqu’à expiration.
Souveraineté 2.0 : la biométrie en étendard
Par ailleurs, derrière cette mue administrative se niche un projet bien plus ambitieux : forger une identité collective inaltérable, à l’abri des faux-semblants. Le passeport AES, bardé de puces cryptographiques et d’hologrammes, se veut un rempart contre la fraude et un outil de traçabilité migratoire. « C’est l’alpha et l’oméga de notre sécurité collective », a insisté un conseiller présidentiel sous couvert d’anonymat, évoquant une « souveraineté augmentée » par la technologie.
Entre utopie et Realpolitik
Pour certains observateurs, ce geste relève autant du soft power que du hard code. « L’AES joue son va-tout sur l’échiquier régional : chaque passeport émis est un pavé dans la mare de la CEDEAO », analyse un diplomate en poste à Accra. Reste à savoir si ce nouvel outil survivra aux tempêtes politiques et techniques. Les prochains défis seront l’uniformisation des systèmes informatiques entre États membres et convaincre les partenaires internationaux d’accepter ce document inédit.
Le Sahel en code QR
Alors que le soleil déclinait sur Ouagadougou, Traoré a brandi son passeport devant les caméras, tel un atlas miniature de la nouvelle donne sahélienne. Ce rectangle vert nuit, strié de circuits électroniques invisibles, pourrait bien devenir le grimoire d’une génération en quête de renaissance. Entre les lignes de code et les frontières redessinées, l’AES écrit son chapitre non pas à l’encre, mais en algorithmes, ultime rempart pour une région dont l’histoire s’est souvent écrite dans le sable.