Il a une base de militants que ses rivaux lui envient, un discours pour réduire les inégalités devenu un must pour tous les démocrates, et une capacité à débattre et résister aux attaques personnelles: voici les principales qualités qui ont fait de Bernie Sanders le favori de la course à l’investiture démocrate.
– Précurseur
Doyen de la course à 78 ans, le sénateur du Vermont, « socialiste » revendiqué, défend les droits des travailleurs et dénonce un système conçu pour les riches depuis les années 70.
Il a fait des inégalités, de l’augmentation du salaire minimum, d’une sécurité sociale sur le modèle européen un leitmotiv depuis 40 ans, alors que ses rivaux et le parti démocrate ne se sont emparés de ces thèmes que récemment. Il prône aussi un « +New Deal+ vert », vaste plan de relance de l’économie alliant justice sociale et lutte contre le changement climatique.
Depuis sa campagne malheureuse contre Hillary Clinton en 2016, le parti démocrate a évolué dans sa direction, et « les idées qui semblaient radicales il y a quatre ans sont devenues en quelque sorte dominantes », disait-il dimanche sur CBS.
« Si les grands partis refusent de prendre les décisions nécessaires pour changer les inégalités économiques dans ce pays, il ne faut pas s’étonner que les électeurs se tournent vers des candidats plus extrêmes idéologiquement », dit Costas Panagopoulos, professeur à Northeastern University.
-Base enthousiaste
Cette constance vaut au sénateur indépendant du Vermont le soutien d’une base électorale « très dévouée », que tous ses rivaux lui envient, souligne David Barker, politologue à l’American University de Washington. Seul Donald Trump peut se targuer d’une base aussi fidèle, selon plusieurs analystes.
Faite surtout de jeunes blancs lors de sa première campagne présidentielle en 2015-2016, cette base s’est diversifiée depuis pour inclure beaucoup plus d’électeurs noirs ou hispaniques, à l’image du soutien actif que lui apporte la jeune élue du Congrès Alexandria Ocasio-Cortez.
Sa victoire haut la main samedi dans le Nevada, première primaire du calendrier organisée dans un Etat où les minorités constituent une part importante de l’électorat, a confirmé l’élargissement de sa base.
Ses partisans sont aussi très généreux, et ont permis au sénateur de bénéficier d’un record de donations individuelles depuis le début de sa campagne (121 millions de dollars).
Utilisant avec dextérité les réseaux sociaux, ils peuvent s’avérer redoutables contre les détracteurs de leur héros. Les critiques contre les méthodes de ces « Bernie bro(thers) » vont d’ailleurs crescendo: le jeune candidat centriste Pete Buttigieg a pour la première fois épinglé publiquement M. Sanders sur ce point lors du dernier débat démocrate mercredi dernier.
– Infatigable
Fort de ses 40 ans d’expérience, et malgré une crise cardiaque qui aurait pu sonner le glas de sa campagne en octobre, Bernie Sanders enchaîne les meetings à travers le pays – où il harangue souvent la foule pendant plus d’une heure – à un rythme endiablé.
Depuis sa victoire dans le Nevada, Bernie Sanders porte désormais son attention vers la prochaine primaire en Caroline du Sud samedi avec l’espoir de l’emporter, ce qui lui donnerait un avantage certain pour le « Super mardi » du 3 mars, rendez-vous clé des primaires avec 14 Etats qui désigneront leur candidat.
– Fin communicateur anti-élite
Depuis 40 ans qu’il défend ses idées « socialistes », dont près de 30 ans comme élu au Congrès, Bernie Sanders a peaufiné ses arguments.
Avec sa dénonciation de Wall Street et son appel à changer « un système corrompu », sa présentation pédagogique du coût du système de santé privé américain ou de la dette étudiante, il est un débatteur aguerri, et un bon communicateur qui ne reculera pas devant Donald Trump, selon M. Barker.
Il partage avec le président un discours anti-élite et une spontanéité qui fait qu' »ils n’ont pas besoin de demander leur avis à un +focus group+ avant de s’exprimer », souligne Jim Campbell, politologue à l’université de Buffalo.
Lors du débat de mercredi dernier, Bernie Sanders a réussi à sortir quasi-indemne d’attaques contre son passé « communiste », émanant du milliardaire new-yorkais Michael Bloomberg, ou contre ses idées présentées comme « clivantes » par Pete Buttigieg.
Donald Trump l’a aussi déjà attaqué plusieurs fois sur son « socialisme » qui, pour beaucoup d’Américains, rime avec le communisme honni de la Guerre froide. Le président a ainsi rappelé son voyage avec sa femme à Moscou en 1988, ou sa défense à la même époque du régime sandiniste au Nicaragua.
Ces attaques font que beaucoup de démocrates modérés doutent que Bernie Sanders puisse emporter la présidentielle face à Trump en novembre.
Mais plusieurs sondages indiquent qu’il peut gagner. Un tout récent sondage CBS News/YouGov le voit ainsi devancer légèrement Trump au plan national, et d’autres sondages le prédisent gagnant dans des Etats-clé comme le Michigan, le Wisconsin ou la Pennsylvanie.