Les forces de sécurité togolaises ont encerclé le domicile du candidat de l’opposition à la présidentielle Agbéyomé Kodjo pendant quelques heures, juste après la fermeture des bureaux de vote, a déclaré l’opposant.
« Ils viennent de partir », a déclaré le candidat du Mouvement patriotique pour le développement et la démocratie (MPDD) à Radio France Internationale après quelques heures de bouclage des rues qui mènent à son domicile de Lomé.
Les forces de l’ordre avaient déclaré vouloir « garantir sa sécurité » en encerclant son domicile ainsi que celui de l’ancien archevêque de Lomé, qui lui a témoigné son soutien pendant la campagne.
Ailleurs dans la capitale togolaise, des barrages militaires se mettaient en place, mais tout était calme dans le pays.
– Problèmes de communication –
L’accès à internet était interrompu de manière sporadique dans la capitale, mais à Sokodé et dans le nord, plusieurs sources contactées par l’AFP ont assuré qu’internet avait été coupé aux alentours de 18 heures (1800 GMT).
Le parti historique de l’opposition, l’Alliance nationale pour le changement (ANC) a également affirmé que ses « responsables politiques sont victimes de coupure de leur téléphone ce qui entrave les communications avec nos délégués dans les bureaux de vote », sur son compte Twitter.
Ce dispositif sécuritaire a été mis en place à la fin d’une journée au cours de laquelle les Togolais ont voté pour choisir leur président, un scrutin sans incident majeur dans lequel le président sortant Faure Gnassingbé, héritier d’une famille au pouvoir depuis plus d’un demi siècle, était en lice pour un quatrième mandat.
Les 9.383 bureaux de vote du pays ont fermé comme convenu à 16 heures (locales et GMT), et ont connu une affluence moyenne à Lomé, et plutôt faible dans les localités du nord et centre-nord selon des informations recueillies par des journalistes de l’AFP.
Dans de nombreux bureaux de vote de la capitale togolaise, le candidat Agbéyomé Kodjo, ancien Premier ministre qui a surpris par sa popularité pendant la campagne électorale, recueillait de nombreuses voix.
A Sokodé, deuxième ville du pays, une source contactée par l’AFP a expliqué que la participation avait été très faible avec moins de 20% dans certains bureaux, mais que le parti au pouvoir, UNIR, maintenait une légère avance sur le MPDD de Kodjo.
L’ANC, conduit par le leader historique Jean-Pierre Fabre, a rapidement reconnu sa défaite et a remercié ses militants dans un bref communiqué de presse.
Au cours de la campagne, des militants de l’opposition se sont dit « déçus », voire « trahis » par l’ANC, qui n’a pas su tirer profit des manifestations de 2017-2018, quand des dizaines de milliers de personnes descendaient régulièrement dans les rues pour demander la démission du président Gnassingbé.
Les résultats officiels sont attendus en début de semaine, selon des sources au sein de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni), et les six candidats de l’opposition ont d’ores et déjà déclaré qu’ils s’uniraient pour faire bloc contre le président sortant en cas de second tour.
– Second tour –
Si aucun des candidats n’obtient la majorité des voix, un second tour doit être organisé quinze jours après la déclaration des résultats, mais ce scénario reste peu probable.
Les partisans d’UNIR s’étaient d’ailleurs déjà réunis dans le fief du président, à Kara (nord) pour célébrer la victoire, avant la proclamation des résultats officiels.
L’opposition, qui a contesté tous les précédents scrutins de 2005, 2010 et 2015, à dit craindre une nouvelle fois des « fraudes ».
L’organisation de la société civile Togo Debout a déclaré avoir recensé « des bourrages d’urnes ici et là, à Lomé et à Vogan (sud) ».
Des délégués de l’opposition se sont également vu refuser les accès dans certains bureaux de vote, selon des membres de la société civile.
Ces incidents s’ajoutent au retrait des accréditations de nombreux observateurs de la société civile, ainsi que l’abandon du système de sécurisation électronique des résultats quelques jours avant le vote.
Faure Gnassingbé est arrivé au pouvoir en 2005 après le décès de son père, qui avait lui-même dirigé le pays pendant 38 ans.
Le président peut se targuer d’une croissance stable de 5%, mais ses détracteurs dénoncent une gouvernance autoritaire et la corruption de son entourage quand la moitié de la population vit sous le seuil de la grande pauvreté, avec moins d’1,90 dollar par jour.
La France, ex-puissance coloniale, allié traditionnel de la dynastie Gnassingbé et présente au Sahel voisin dans la lutte contre les mouvements jihadistes, est particulièrement sensible à la stabilité du Togo dans une Afrique de l’Ouest en proie à la violence jihadiste.