Abattu il y a cinq ans près du Kremlin, l’opposant russe Boris Nemtsov est devenu un symbole de ralliement pour les voix critiques du Kremlin, dont les partisans célèbrent sa mémoire par une manifestation samedi.
– Charismatique opposant
Incarnant la génération des jeunes réformateurs des années 1990, il a d’abord servi comme gouverneur de la région de Nijni-Novgorod avant de devenir en 1997 vice-Premier ministre du président d’alors, Boris Eltsine.
Nemtsov, qui quitte le gouvernement avec la dévastatrice crise économique de 1998, fut envisagé par Eltsine comme un dauphin potentiel, avant de finalement lui préférer Vladimir Poutine.
Après l’arrivée au pouvoir de Poutine en 2000, Boris Nemtsov rejoint les rangs des critiques du nouveau président et devient notamment l’un des chefs de file de la vague de contestation de 2011-2012.
Plusieurs fois interpellé, perquisitionné et mis sur écoute, il s’était spécialisé dans les enquêtes sur la corruption dans les hautes sphères de l’Etat.
– Abattu au coeur de Moscou
Boris Nemtsov a été abattu à 55 ans de plusieurs balles le soir du 27 février 2015, sur un pont à deux pas du Kremlin, siège du pouvoir russe. Sa mort provoque la stupeur.
Bien que plutôt en retrait de la vie publique depuis quelque temps, il avait appelé le jour même de son assassinat à participer à une manifestation contre la guerre en Ukraine, qui a éclaté l’année précédente entre forces de Kiev et séparatistes pro-russes.
Selon ses alliés politiques, il préparait également un dossier prouvant l’implication massive dans ce conflit de troupes régulières russes, ce que Moscou a toujours nié malgré les constatations de nombreuses organisations et médias dont l’AFP.
Deux semaines après le meurtre, cinq suspects sont arrêtés. Tous sont originaires des républiques du Caucase russe et seront condamnés en 2017 à des peines de 11 à 20 ans de prison.
L’enquête estime que Boris Nemtsov a été assassiné pour ses critiques de l’Islam. Le commanditaire est identifié comme Rouslan Gueremeïev, commandant d’une unité militaire tchétchène. Il n’est jamais arrêté et est considéré en fuite à l’étranger.
L’opposition russe ne croit guère à cette thèse, jugeant plus probable que l’assassinat a été ordonné par le dirigeant de la Tchétchénie, Ramzan Kadyrov ou son entourage. Les opposants russes l’accusent d’être impliqué dans les morts de plusieurs de ses détracteurs.
– Symbole
La mort de Nemtsov a profondément marqué l’opposition au Kremlin qui organise autour de l’anniversaire de son assassinat l’un de ses plus importants rassemblements chaque année.
Ses partisans entretiennent jour après jour un mémorial de fortune sur le pont où il a été tué et que la mairie de Moscou a plusieurs fois tenté de débarrasser. Aucune plaque commémorative officielle n’a été installée.
De nombreux pays occidentaux ont eux rendu hommage à l’opposant de diverses manières. A Washington, la rue passant devant l’ambassade russe a été baptisée Boris Nemtsov, suscitant la colère de Moscou.
Ce mois-ci, Prague a fait de même avec la place faisant face à la représentation diplomatique russe en République tchèque.
Réagissant à cette décision, le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov a estimé que la Russie « aurait préféré » que les autorités tchèques rendent hommage aux forces soviétiques ayant vaincu les Nazis en Europe centrale et orientale il y a 75 ans.