Au moins 241 personnes ont été tuées dans une attaque délibérée des forces de sécurité soudanaises contre un sit-in à Khartoum le 3 juin 2019, a affirmé jeudi l’ONG Physicians for Human Rights (PHR).
Cet épisode est le plus sanglant du mouvement de contestation du régime de l’ancien président Omar el-Béchir qui a duré cinq mois et fait plusieurs centaines de morts, selon divers bilans. Il s’est produit après le départ de M. Béchir en avril 2019.
Malgré la chute d’Omar el-Béchir écarté par les militaires, les Soudanais ont continué à manifester voyant dans son remplacement par un Conseil militaire un « coup d’Etat ».
Le 3 juin 2019, les forces de sécurité sont intervenues pour faire cesser le sit-in organisé devant le QG de l’armée à Khartoum. Après avoir attribué l’attaque à des « hommes en uniformes », les autorités ont fini par reconnaître qu’elle avait été menée par les forces de sécurité.
Elles ont toutefois affirmé que des manifestants ont été tués « par erreur ». Un comité de médecins, proche des manifestants a avancé un bilan de 127 morts mais les autorités n’ont parlé que de 71 tués.
Pour PHR, une ONG américaine documentant les graves violations des droits humains par le biais de la médecine notamment, il s’agit en réalité d’une série d' »attaques violentes et planifiées (des forces de l’ordre) contre les manifestants prodémocratiques ».
« Ces forces ont ciblé intentionnellement les travailleurs et les établissements de santé par le harcèlement, l’intimidation et la violence et ont soumis les manifestants, hommes et femmes, à des violences sexuelles et sexistes », a accusé l’ONG dans un communiqué accompagnant son rapport de 61 pages.
Le rapport de PHR, intitulé « Chaos et feu, une analyse du massacre du 3 juin 2019 à Khartoum » est basé sur des entretiens avec 30 survivants de l’attaque, des témoignages, des évaluations cliniques et l’analyse de milliers de photos et vidéos.
Ces éléments fournissent des « preuves irréfutables d’actes de violence inadmissibles contre les manifestants prodémocratie, notamment des exécutions extrajudiciaires et des actes de torture, un usage excessif de la force, des violences sexuelles et sexistes, et la disparition forcée de manifestants », a souligné PHR.
« Le massacre du 3 juin contre les civils soudanais des mains des forces de sécurité est une violation flagrante des droits humains », a déclaré Phelim Kine, directeur de la recherche et des enquêtes de PHR.
Une commission d’enquête soudanaise n’a toujours pas rendu ses conclusions définitives sur cet épisode sanglant de la contestation près de dix mois après les faits.
Les militaires se sont associés en août 2019 aux civils au Soudan pour former un Conseil souverain afin de superviser la transition vers un régime civil. Le premier gouvernement post-Béchir a prêté serment le 8 septembre.