N’Djamena, le 25 février 2025 – Dans un mouvement significatif au sein des sphères sécuritaires tchadiennes, le Maréchal Mahamat Idriss Déby, président de la République, a signé hier un décret présidentiel marquant un tournant pour la Direction générale des Renseignements et des Investigations (DGRI). Par cette décision, le Général de Division Abdou Idriss Sorgouno a été nommé à la tête de cette institution stratégique, succédant ainsi au Général de Corps d’Armée Brahim Mahamat Seid, en poste depuis janvier 2024.
Sorgouno : un changement à la tête des Renseignements
La nomination d’Abdou Idriss Sorgouno intervient dans un contexte où le Tchad continue de naviguer entre défis sécuritaires internes et pressions régionales. Le général Sorgouno, figure bien connue dans les cercles militaires, apporte avec lui une expérience solide, notamment acquise en tant que directeur général adjoint de la DGRI sous l’ancienne direction. Cette promotion n’est pas une surprise pour les observateurs avertis, qui voyaient en lui un successeur naturel, compte tenu de son implication passée dans les rouages de l’appareil de renseignement tchadien.
Le président n’a pas écarté le général Brahim Mahamat Seid sans honneur. Immédiatement après son limogeage, il l’a désigné comme son conseiller spécial, un poste qui témoigne de la confiance continue que lui accorde le chef de l’État. Cette transition rapide illustre une volonté de maintenir une certaine continuité tout en insufflant un nouvel élan à la DGRI.
Sorgouno : une carrière au service de la sécurité nationale
Abdou Idriss Sorgouno n’est pas un novice dans le domaine de la sécurité. Avant cette nomination, il avait déjà occupé des postes clés, notamment celui de directeur général adjoint des Renseignements et Investigations, nommé par un décret datant du 10 novembre 2022. Il a gravi progressivement les échelons de la hiérarchie au sein des forces de sécurité tchadiennes, malgré les turbulences qui ont jalonné son parcours. En effet, des rapports antérieurs ont fait état d’une suspension temporaire de ses fonctions pour « manquements professionnels », selon une note du ministère de la Sécurité publique, bien que les détails de cette affaire restent flous.
Ce passé contrasté n’a toutefois pas entravé sa progression. Sa nomination au poste de directeur général semble refléter une reconnaissance de ses compétences opérationnelles et de sa capacité à gérer les défis complexes auxquels fait face le Tchad, notamment la menace persistante des groupes armés dans la région du Sahel et les tensions politico-sociales internes.
Un contexte politique et sécuritaire tendu
Cette décision intervient à un moment où le président Mahamat Idriss Déby, récemment élevé au rang de Maréchal, consolide son emprise sur les institutions clés du pays. Élu en mai 2024 à l’issue d’un scrutin controversé, puis intronisé Maréchal en décembre de la même année, il multiplie les ajustements au sein de l’appareil sécuritaire. Quelques mois plus tôt, en octobre 2024, les autorités ont remplacé plusieurs hauts responsables de la police, de la gendarmerie et de l’armée, signe d’une restructuration plus large orchestrée depuis le palais présidentiel.
Le Tchad, pilier stratégique dans la lutte contre le terrorisme au Sahel, doit faire face à des enjeux cruciaux : la sécurité des frontières, la gestion des conflits intercommunautaires et la montée des critiques de l’opposition, qui dénonce un « climat de dictature ». Dans ce cadre, la DGRI joue un rôle central, non seulement dans la collecte d’informations, mais aussi dans l’anticipation des crises potentielles.
Perspectives et défis à venir
Avec Abdou Idriss Sorgouno à sa tête, la DGRI pourrait adopter une approche plus proactive, tirant parti de son expérience sur le terrain. Cependant, les attentes sont élevées. Le nouveau directeur général devra prouver sa capacité à renforcer la coordination entre les services de renseignement et les autres branches des forces de sécurité, tout en répondant aux critiques sur la transparence et les méthodes employées par son institution.
Pour beaucoup, ce changement est une tentative de Mahamat Idriss Déby de placer des hommes de confiance aux postes stratégiques, alors que le pays se prépare à des échéances politiques et sécuritaires majeures. Il reste à voir si le général Sorgouno transformera cette opportunité en un levier pour stabiliser davantage le Tchad, ou si son mandat rencontrera les mêmes défis que ceux de ses prédécesseurs. En attendant, cette nomination, annoncée hier, continue de susciter des débats à N’Djamena et au-delà, illustrant une fois de plus la centralité des questions de sécurité dans la gouvernance tchadienne sous l’ère Déby.